La fleur et le cheval.

Publié le par Léonard

 

Nous devions apporter une voiture au contrôle technique. Rien de bien réjouissant, rien de dramatique non plus, juste une des petites obligations communes de la vie en société. Si tu ne veux pas qu’une andouille maladroite au volant d’un tas de ferraille sans frein te fracasse la tronche en rase campagne tu dois te plier aux mêmes règles de sécurité.

Nous déposons donc notre pièce de collection (15 ans d'âge, 240 000 kilomètres au compteur, respect) chez le spécialiste des systèmes complexes.

Que faire en attendant ?

Une balade en zone industrielle… Non.

Un hypermarché issu de la cogitation cérébrale d’un Landernéen bigot et avide de profit jouxte les fabriques de rien qui coûte cher, en clair un Leclerc.

-On va se chercher un truc à bouffer pour midi ?

-Quitte à rien foutre.

Suite à ce long échange habité par Lacan, Onfray, Paul Bocuse et William Saurin nous pénétrons dans les rayons surchargés de ce temple qui n’attend que Jésus en personne pour faire le vide.

Nous savons que la bouffe est judiceusement placée à gauche mais nous tournons à droite en direction des rayons du futile. Personnellement j’ai une excuse : je n’ai ni carnet de chèque ni carte bleue. Je peux tomber en pamoison devant un ordi à la noix ou un grille-pain gaufrier je n’ai que la monnaie du fond de ma poche pour assouvir mes achats pulsionnels. Ca calme. Et ça relativise la bonne affaire.

Histoire de passer le temps je fais une pause devant un présentoir de cartes postales.

Pas plus de tentation ici, je n’ai pas plus d’amis qu’il n’y a de doigts à la main droite d’un menuisier en fin de carrière et je n’écris jamais. De courrier.

Des chatons dans des pelotes de laine, des chiens avec baballes, des dadas avec poulain, des vaches qui font meuh, des cochon qui disent grouik, des dauphins fendant les vagues, des scènes de la vie rurale brouette, fourche et blouse rapiécée, des femmes lascives équipées de poitrines Goodyear collées à des bagnoles écarlates, des grands cons cravatés un genou à terre et une bague à la main… Le choix est large. Et non exhaustif.

La non culture brûle la rétine.

Livrés à eux même mes doigts boudinés et néanmoins alertes s’égarent dans les piles de daubes glacées et cartonnées et en retirent un curieux squatteur. Ce n’est pas du niveau de Soubirous l’allumée de Massabielle mais je ressens comme un frisson. Cette carte postale m’interpelle comme disent les intellectuels qui n’osent dire que cela leur troue le cul.

Donc la carte m’interpelle.

Un dessin enfantin, un slogan simple, une colorisation sobre : le tout en pleine poire.

Deux exemplaires sous le bras. Plus des gâteries pour Toupie, et Léo. Indispensables.

 

Nos richesses dans la poche nous allons récupérer notre bagnole. 70 euros et nous repartons avec l’autorisation d’aller nous faire tuer sur les routes en toute sécurité.

 

Une fois à la maison je pose un des deux exemplaires de mes découvertes bien en vue à la cuisine près de l’entrée. Le temps passe.

Pourquoi ne pas proposer cette carte exceptionnelle à la vente dans notre petit réseau ? Me dis-je un soir de vision proche du délire mystique.

 

Je contacte le créateur en Espagne. Olé. On me répond. Hourra.

 

Mais, me direz vous, quel est donc ce dessin enfantin qui m’a tant impressionné ? Quel est donc ce slogan qui a ému mes neurones ?

 

Cette carte postale met en scène un cheval et une fleur.

Le cheval sobrement dessiné, preque esquissé, a les pieds bien posés sur le sol, la queue frisottante. Curieux, surpris, amical, apeuré peut-être il regarde une fleur piquée sur un mince tapis d’herbe.

De grosses larmes jaillissent des pétales de la frêle marguerite. C’est une marguerite.

Ce texte imprimé comme un tampon frappé sans conviction sur un bout de papier qui finira à la corbeille est un slogan qui tient en deux phrases :

« La nature nous appelle au secours. Mais personne ne l’écoute. »

Le mot « personne » est blanc alors que le reste du texte est noir.

Ce slogan s’adresse directement à moi. Il s’adresse aussi à vous.

Il est donc pour nous. Individuellement.

Collectivement nous ne sommes personne, la fleur pleure son manque d’écoute, le cheval veut une réponse.

 

Seul avec notre conscience nous sommes la personne qui peut changer les choses, la personne qui redonnera le sourire à cette fleur qui crie dans le désert et rassurera le triste cheval.

 

Grâce à l’éditeur français cette carte postale créée par Téo Tarras est désormais en vente chez Haridelle et Compagnie (1,40€). Ce n’est pas là-dessus que nous comptons pour nous offrir une Cadillac de service mais nous sommes très honorés de cette marque de confiance.

 

Format 11,5x 16,5 cm

Copie-de-CP551_WEB.jpg Les bénéfices de cette vente,

comme ceux de tous les produits de notre boutique,

permettront d'assurer les frais vétérinaires de nos équidés.

Publié dans Haridelle et Compagnie

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